Ustensiles et matériaux
Peinture et calligraphie exigent un certain matériel de base : il s’agit du pinceau, de l’encre, de la pierre à encre et du papier. Ces quatre éléments sont le symbole même de la peinture et de la calligraphie. Aucun artiste ne pourrait s’en passer. A cet équipement élémentaire s’ajoutent ensuite couleurs, supports, soies et divers accessoires utilisés pour le montage des œuvres sous forme de rouleaux qui permettent leur exposition ou leur conservation.
Pinceau (bi 筆)
Instrument pluridisciplinaire dont l’usage est probablement apparu à partir du 5e siècle av. J.C. et s’est progressivement répandu au cours du 3e siècle av. J.C., il est fait de poils d’animaux et, le plus souvent, d’un manche de bambou, bien que des matériaux plus précieux puissent être utilisés : jade, ivoire, porcelaine…
Un bon pinceau doit avoir un certain nombre de qualités. Tout d’abord, on vérifie la régularité du manche en le faisant rouler sur une surface plane. Mais c’est surtout à la qualité des poils qu’il faut être vigilant. La pointe doit être parfaitement conique et légèrement arrondie, pour que les poils ne se dispersent ni ne s’aplatissent ; elle doit rester compacte lorsqu’on la pince entre les doigts, après l’avoir humidifiée ; enfin, elle doit être effilée et ferme. Il faut, évidemment une bonne expérience pour juger de tout cela, d’autant plus que les pinceaux neufs sont enduits d’une colle qui les rend durs et pointus comme des aiguilles. Un critère essentiel est l’opposition entre souplesse et rigidité, chacun de ces deux aspects étant à privilégier selon ce qu’on veut peindre ou en fonction du style et de la taille de la calligraphie. On distingue également les pinceaux constitués d’une seule sorte de poils et ceux qui en combinent plusieurs.
Le pinceau en poils de chèvre (yanghao 羊毫) est très souple ; il convient pour la calligraphie dans le grand style régulier (dakaishu 大楷書) et pour peindre en traits larges et amples (gros fruits, feuilles larges, grandes fleurs…).
Pour le petit style régulier (xiaokaishu 小楷書), on emploie le lièvre (ou lapin) pur ou mélangé avec de la chèvre, dans différentes proportions; le lièvre est plus rigide et plus vif mais il a peu de réserve, à la différence de la chèvre, d’où l’intérêt de leur combinaison. Le rapport le plus courant est 7 parts de lièvre pour 3 parts de chèvre. On l’utilise également pour la peinture de style minutieux (gongbihua 工筆畫).
Des pinceaux de chèvre aux très longs poils servent parfois à tracer les arabesques rapides du style « en herbe » (caoshu 草書) ; on s’en sert également en peinture (plis des vêtements des personnages, par exemple).
Le vison de Sibérie (Mustela sibirica, en chinois huangshulang 黄鼠狼) est très utilisé (les artistes français le connaissent sous l’appellation de « martre Kolinsky »), tant en peinture qu’en calligraphie. Son poil est vif mais sans raideur excessive ni rugosité. Il est communément appelé langhao 狼毫 (littéralement poils de loup, bien que le loup ne soit pas utilisé dans sa fabrication, il s’agit seulement d’une contraction de huangshulang 黄鼠狼).
Un pinceau à poils de martre, très ferme et pointu, appelé lanzhu 蘭竹, permet de peindre, comme son nom l’indique, les feuilles de l’orchidée de Chine (lan) et les traits nerveux du bambou (zhu). De nos jours, il est fréquemment monté avec des poils de vison de Sibérie.
Le poil (surtout le crin de la crinière ou de la queue) du cheval 山馬毫 est très rigide et il retient peu d’encre, ce qui rend son emploi rare en calligraphie. Lorsqu’il est de première qualité, il sert à peindre les cheveux et barbes des personnages, les branches fines de certains arbres et les pistils ou étamines des fleurs. Il est très utilisé dans la peinture de l’école Lingnan 嶺南. S’il est médiocre, avec peu de pointe, on l’emploie pour le tracé rugueux des textures grossières (rochers, écorces des vieux arbres, certaines parties des paysages).
Il existe encore d’autres sortes de pinceaux, d’usage moins courant, en poils de cerf, de tigre ou de divers félins, de blaireau, de porc, de différentes sortes de rongeurs et de plumes de coq. Il est même traditionnel de conserver les cheveux qu’on coupe pour la première fois aux enfants, pour en faire des pinceaux…
(à suivre)